Madame Andrée L. 81 ans consulte de la part d son chirurgien dentiste pour des « acouphènes invalidants ». Cette patiente, très dynamique pour son âge, souffre depuis plus de 10 ans d’acouphènes violents et de surdité progressive qu’elle associe à ces acouphènes. Elle dit vivre un calvaire d’autant que sa surdité la coupe de toute vie sociale. Elle a consulté des ORL sans aucune amélioration et apparemment sans diagnostic. Son médecin a renoncé à pouvoir la soulager et elle n’a plus d’espoir. L’acouphène se manifeste par un sifflement continuel, augmenté par la position allongée. La patiente dit être assourdie par la bruit de l’acouphène. Il existerait un gonflement maxillaire gauche au réveil. La patiente qui a été très stressée en 1997-1998 à la suite du décès de son mari, se dit aujourd’hui plus calme, si ce n’était cet acouphène.
La motilité mandibulaire est quasi normale avec des amplitudes de mouvement diminuées, mais sans ressaut, douleur ou bruit articulaire. La palpation ne révèle pas de sensibilité particulière des muscles masticateurs ou des condyles mandibulaires.
La décontraction mandibulaire est approximative mais permet de mettre en évidence un décalage important entre ORC et OIM, du à une énorme prématurité entre les dernières molaires droites. En particulier la 48 présente un pan d’émail vestibulaire vertical de 2 ou 3 mm, résultat d’une usure parafonctionnelle sélective de la face occlusale.
Compte tenu de l’absence de résultat par les voies médicales traditionnelles nous posons l’hypothèse d’une participation du désordre occluso-mandibulaire à l’entretien de l’acouphène. Une orthèse occlusale en ORC du jour est mise en place.
Revue 3 semaines plus tard la patiente nous dit (mais elle a peur d’y croire) qu’elle a une très forte atténuation des bruits. En particulier les « coups de fusils » qu’elle percevait en se couchant ont disparu. Une équilibration de l’obstacle le plus grossier (48) est réalisée sans qu’il soit utile de modifier l’orthèse orale. Il apparaît alors que la 28 constitue la nouvelle prématurité. Après avoir contrôlé l’équilibration de l’orthèse, nous demandons à la patiente de voir son praticien pour extraire la 28 sans antagoniste.
La patiente est revue 3 mois plus tard: elle nous apprend que l’acouphène a disparu…mais elle a encore du mal à y croire. Sa vie a changé dit-elle.
3 commentaires
adjl a dit:
Fév 15, 2013
beau résultat, mais il ne faut pas laisser croire que les acouphènes sont dus à des contacts prématurés! il y a au moins 20 autres étiologies possibles et sans doute parfois associées
jeannine a dit:
Fév 15, 2013
Tout à fait d’accord. Pour ma pratique personnelle j’ai au moins 10 fois plus d’acouphènes non modifiés par une orthèse que de cas favorables comme celui ci.
Apparemment le handicap est tel que les patients souhaitent tester l’hypothèse occlusale si les autres voies thérapeutiques habituelles sont sans résultat. Nous ne nous plaçons que dans ce contexte. Mais ne boudons pas notre plaisir ni le fait que les odontologistes ont là encore une place importante à tenir en terme de santé publique.
Jyemmepe a dit:
Mar 2, 2013
En effet ADJL, les acouphènes ne sont pas (tous) dus à des contacts prématurés, mais faisant partie de la symptomoatologie éventuelle dans les DAM, devant une occlusion manifestement perturbée par une dent extrusée ou une couronne grossière, il est légitime et utile (la preuve )de lever la prématurité ou l’interférence.
Je n’ai pour ma part jamais pu faire disparaitre un acouphène en corrigeant l’occlusion, tout au plus obtenir son atténuation.