Aucun traitement occlusal ne peut être effectif sans une stabilité des pièces articulaires de l’ATM. A ce titre, l’examen occlusal doit commencer par l’examen des ATMs. L’objectif thérapeutique au niveau articulaire est, comme l’exprime Okeson, « l’obtention d’une position articulaire orthopédiquement stable ». Cette position doit pouvoir permettre aux ATMs de supporter la pression maximale lors de l’activation des muscles élévateurs, sans aucun signe d’inconfort. La représentation la plus courante de l’ATM est une coupe antéro-postérieure passant par le centre du condyle.
Cette vue est insuffisante pour comprendre la réalité physiologique de laRC.
En effet, sur une vue supérieure de l’os mandibulaire, on remarque que les condyles ne sont pas parallèles à l’axe horizontal.
Deux conclusions s’imposent :
1- L’axe de charnière de rotation entre les deux condyles passe par le pôle médial de chaque condyle.
2- Le pôle latéral du condyle subit une translation lors d’une rotation pure du corps mandibulaire.
Ces constatations faites au niveau des condyles doivent correspondre avec les observations anatomiques de la fosse articulaire de l’os temporal.
La fosse mandibulaire, en vue inférieure, présente une forme caractéristique, en forme de V dont l’apex se situe médialement. Cette anatomie confirme que l’axe charnière de rotation passe bien par le pôle médial de chaque condyle.
L’ATM est conçue pour résister à de fortes pressions. Les deux condyles servent de points d’appui à la mandibule lors de l’activation des muscles élévateurs. La densité d’os épais, non vascularisé et non innervé est plus forte dans la partie médiale de la fosse mandibulaire, ce qui constitue une zone de résistance à l’application des pressions.
L’éminence temporale forme la partie antérieure de la fosse mandibulaire. Lors de la contraction des muscles élévateurs, et en raison de la légère composante antérieure de la contraction, les condyles sont fermement plaqués contre la partie postérieure de l’éminence temporale (avec l’interposition du disque articulaire). L’éminence temporale et la partie antérieure du condyle sont convexes, ce qui permet d’expliquer la forme biconcave du disque articulaire.
La RC est la position mandibulaire de coaptation condylo-discale lorsque les condyles sont simultanément stabilisés en position haute, antérieure et médiale. Dans cette position, les ATM peuvent supporter la contraction musculaire maximale des muscles élévateurs sans aucun signe d’inconfort.
Lectures conseillées :
– Okeson JP. Management of TemporomandibularDisorders and Occlusion. St. Louis, MO: Mosby; 1974:111.
– Nakazazawa K, Hong T, Tatashi J : The anatomic importance of centric relation. Anatomic Atlas of the Temporomandibular Joint, Tokyo, Quintessence, 1991.
Les illustrations sont extraites de l’ouvrage de P. E. Dawson : Functional occlusion : from TMJ to smile design – Mosby Elsevier.
7 commentaires
Hans Block a dit:
Déc 14, 2012
Merci à QSPEEDO pour cet article qui pose des questions importantes et qui me tiennent à coeur. J’aimerais d’abord l’interroger sur sa première affirmation:
« L’axe de charnière de rotation entre les deux condyles passe par le pôle médial de chaque condyle »
Pour ma part je ne vois pas les arguments géométriques qui permettent de l’affirmer. Un axe charnière peut passer par n’importe quels points pris dans les condyles (ou peut être même ailleurs. cela a été montré il y a bien longtemps: par deux points passe une droite et une seule. Voulez vous dire que dans votre esprit il serait préférable que l’axe charnière passe par les pôles médiaux des condyles? Pour quelle raison? Géométrique? Clinique? Prothétique?
Dans la réalité, pour la plupart des bouches on observe cliniquement que l’ouverture se fait selon plusieurs axes charnières. Et d’ailleurs, pourquoi faudrait-il qu’il n’existe qu’un seul axe de rotation pour les 20 premiers millimètres d’ouverture buccale? On a dit que « le jeu est l’âme de la mécanique ». Pour la physiologie mandibulaire c’est encore mieux: le jeu (par la déformabilité des tissus articulaires, par la présence d’un disque, par la non concordance des mouvements condyliens droite-gauche, par l’infinie possibilité de la variabilité dimensionnelle des muscles)c’est la fonction elle même.
En fait, la RC n’a rien à voir avec les mouvements mandibulaires, les axes charnières et autres réflexions mécanistes. La RC est une position arrêtée qui, comme vous le dites, doit permettre de stabiliser la mandibule dans une position physiologique. Tout le reste n’est que construction mentale, concept occluso- prothétique, enjeu de discussions sans véritable intérêt clinique.
Peut-on se poser la question de la RC sans déborder sur ces vues de l’esprit? Il le faut car c’est la physiologie seule qui doit nous guider. L’appareil manducateur doit fonctionner en utilisant une position mandibulaire dans laquelle il peut développer les forces de serrage maximales sans menacer son homéostasie. Est ce cela la RC dont vous parlez? Si oui pourquoi évoquer l’axe charnière?
Q-SPEEDO a dit:
Déc 15, 2012
Le concept de RC est fondamental car c’est la seule boussole qui permet de guider les traitements occlusaux dont le but ultime est, rappelons le, de faire coïncider une position articulaire stable et physiologique avec des contacts dento-dentaires « harmonieusement » répartis.
Ce concept est malheureusement trop souvent mal compris, mal interprété, mal enseigné, malmené… Or, il s’appuie avant tout sur des constatations anatomiques et physiologiques :
– les constations anatomiques d’abord (et c’est que j’ai tenté de mettre en évidence grâce à l’observation des pièces osseuses) : la forme et l’orientation de la cavité glénoïde d’une part et des condyles mandibulaires d’autre part.
– les constatations physiologiques (et vous avez tout à fait raison de le faire remarquer) ne doivent pas être écartées; le jeu musculaire plus particulièrement et la physiologie articulaire (synovie, disque articulaire…)
Les muscles élévateurs sont tous disposés en avant des condyles et en arrière des dents.
Résultat : lors de la contractions des muscles élévateurs de la mandibules, les condyles doivent être intimement plaqués en relation centrée (sauf si atteinte structurelle des ATM) contre la partie supéro-antéro-médiale de la cavité glénoïde avec interposition du disque articulaire. Si le jeu physiologique musculaire est perturbée par des interférences occlusales notamment, les condyles ne seront plus en RC lors du serrage. Le ptérygoïdien latéral est, en conséquence, hyperactivé alors qu’il devrait être inhibé. Le dysfonctionnement neuro-muculo-articulaire peut s’installer…
Pour répondre à votre remarque concernant l’axe charnière : ce n’est pas le concept d’axe charnière qui explique la RC mais plutôt l’inverse : l’axe charnière est la conséquence de la position des condyles en RC, fermement maintenus pas la contraction des muscles élévateurs. Dans cette position, stable et unique, il n’y a qu’un seul axe charnière permettant une rotation pure du corps mandibulaire et cet axe passe par le pôle médial des deux condyles (encore une fois, sauf si anomalie structurelle). L’axiographie en est la matérialisation. Les pôle latéraux des condyles en revanche ne s’alignent pas sur cet axe charnière de rotation. Ainsi, dans les mouvements de ouverture et de fermeture, ils subissent un mouvement de translation, ce qui explique la forme triangulaire à pointe médiale de la cavité glénoïde qui, physiologiquement, permet une bien meilleure distribution du liquide synovial sur les surfaces articulaires que si le condyle et la cavité glénoïde avaient une forme parfaitement sphérique.
Nous avons tous vu ces films transcraniaux de l’ATM lors des mouvements d’ouverture et de fermeture qui montrent bien le mouvements de translations des condyles mandibulaires. Mais c’est le pôle latéral du condyle que l’on voit alors que tout se joue au pôle médial!
Votre conclusion me convient parfaitement et me fait penser que vous et moi sommes d’accord : c’est dans la position de RC ainsi définie que les ATM peuvent supporter les forces de serrage sans aucun signe d’inconfort.
LAPALISSE a dit:
Déc 16, 2012
» Le pôle latéral du condyle subit une translation lors d’une rotation pure du corps mandibulaire. »
Si l’on suit cette proposition, le pôle latéral du processus condylien n’appartiendrait donc pas au « corps mandibulaire » ?
Révolutionnaire ! :O)))))))
Q-SPEEDO a dit:
Déc 16, 2012
« Quand le sage montre le ciel, l’imbécile regarde le doigt » 😉
Bien que vous n’ayez pas proposé de reformulation, votre moquerie me fait penser que vous avez malgré tout compris le sens du propos.
Si ce n’était malheureusement pas le cas, je veux bien vous l’expliquer dans des termes différents mais le sens reste le même : Les pôles médiaux des condyles sont les seuls points qui permettent un axe fixe de rotation car les condyles ne sont pas orientés parallèlement à l’axe horizontal. Cela veut donc dire que les pôles externes doivent translater, même si les pôles médiaux tournent autour d’un axe fixe (comme c’est le cas en RC).
LAPALISSE a dit:
Déc 17, 2012
Je me contenterai de regarder la trajectoire du processus condylien, …et vous invite à en faire autant. ;O))))
Rotation : mouvement d’un corps autour d’un axe ; tous les points de ce corps sont animés de la même vitesse angulaire.
En conséquence, lors d’une « rotation pure » du corps mandibulaire (obtenu par exemple au cours d’un enregistrement de la RC), le pôle latéral du processus condylien effectue, ne vous en déplaise, une rotation lui aussi (autour de l’axe charnière bi-condylien).
Si vous observez une translation de l’un quelconque des points du corps sensé être en « rotation pure », c’est qu’il ne l’est pas, ou plus ; ce corps effectue rait alors une roto-translation comme le fait le corps mandibulaire au cours du mouvement d’ouverture buccale.
Q-SPEEDO a dit:
Déc 17, 2012
Vous avez raison, le terme exact est : roto-translation du pôle externe des condyles. L’enveloppe du mouvement du condyle, lors de la rotation pure du corps mandibulaire est un cône à base latérale et dont le sommet se situe au pôle médial.
Je propose à l’administrateur de modifier le texte de l’article sur ce point.
Merci LAPALISSE pour cette précision.
editeur a dit:
Déc 17, 2012
Merci pour cet échange. Je pense qu’il ne faut pas modifier le texte initial car c’est précisément de la discussion que nait l’intérêt d’un post et la légitimité d’un blog par rapport à une revue écrite. La discussion sur des points de désaccord ou sur des points qui demandent à être préciser permet aux lecteurs de retrouver leurs propres interrogations. La lecture d’un article laisse le lecteur sur la frustration de ne pouvoir faire entrer l’auteur dans la réflexion. Lors d’une conférence, c’est souvent le trac d’intervenir en public qui limite les discussions. Un blog, y compris par l’utilisation d’un pseudo, permet de discuter « librement ». La liberté de penser et de dire, en matière de formation continue ou initiale, c’est le facteur principal de progrès après l’observation.