Il est toujours intéressant de pouvoir suivre l’évolution des cas cliniques présentés. Surtout quand le cas est aussi dramatique que celui de Monsieur Jacky M. présenté le 06.03.2012. Ce jeune patient, est finalement retourné consulter le chirurgien maxillo-facial qui l’avait opéré le 26 novembre 2011. Nous imaginons volontiers qu’il lui a produit les examens scanner réalisés dans notre service. Nous recopions ci dessous in extenso le compte rendu opératoire de la nouvelle intervention subie le 23 mars 2012.
« Reprise d’arthroplastie temporo-mandibulaire bilatérale pour à nouveau des craquements et douleurs chez un patient hypertonique »
« On commence par le coté droit: incision cutanée prétragienne…décollement de la peau en avant sur 2cm. hémostase soigneuse au bistouri électrique. Incision du SMAS selon le même tracé. décollement de celui ci assez difficile en raison de la fibrose de la première intervention. On aborde l’étage sus méniscal où l’on constate des adhérences au niveau du ménisque et surtout une perforation en interne à nouveau. Cette perforation est fermée au Ticron 3.0. On passe par discision fine à l’étage sous méniscal et on constate une tête condylienne quelque peu irrégulière qui est régularisée. Le ménisque est ensuite fixé par une attache Mitek à nouveau comme la première fois. On referme sur drain de Redon aspiratif par des points au Polysorb 5.0 résorbable puis par un surjet intra-épidermique au Monosoft 5.0.
Pour le coté gauche: l’intervention est la même. On tombe sur une tête plus irrégulière sans perforation méniscale. la régularisation est plus importante de ce coté. La fermeture est la même. »
Cette ré-intervention, consentie sinon souhaitée par le patient, éclaire un peu plus sur le tableau clinique global de ce cas et permet de proposer une réponse à la question qu’avait posée Q-SPEEDO lors de sa dernière intervention sur le post initial. Pour ma part, je pense que le fond du problème est d’abord la personnalité du patient, qui souffre incontestablement, et qui exige d’être pris en charge; à n’importe quel prix! Qui mieux que lui sait que la première intervention est un échec et ne l’a pas soulagé? S’il retourne vers le chirurgien c’est d’abord parce qu’il veut qu’on prenne en charge sa souffrance et parce que cette intervention confirme, à ses yeux, une cause lésionnelle. Ce qui exclut par conséquent, à ses yeux, que sa souffrance soit avant tout d’ordre psycho-émotionnel. Nous avions tenté de lui faire prendre conscience que cette voie devrait être explorée et l’avions senti très réticent. Nous lui avions indiqué le service de prise en charge de la douleur du CHU le plus proche et fait un courrier dans ce sens. Visiblement sans résultat. Quant à l’hypothèse occlusale, n’importe quelle personne, quant à déplacer le problème vers du somatique, préfèrerait qu’on touche les dents plutôt que les ATMs. Les « 3 semaines de bonheur » sont à replacer dans ce contexte. L’occluso n’a pas marché car le premier chirurgien dentiste a échoué, l’orthodontiste n’a pas voulu intervenir et de mon coté je lui ai montré qu’une micro retouche occlusale ne changeait rien. Alors pour répondre à Q-SPEEDO l’ordre est le suivant: 1 puis 2; 3 est hors sujet.
Il reste inquiétant cependant que des éléments aussi importants ne soient pas connus d’un médecin chirurgien maxillo-facial aussi interventionniste.
1 commentaire
Q-SPEEDO a dit:
Avr 6, 2012
Bonjour et merci de nous faire part de ce suivi clinique, certes dramatique mais révélateur du potentiel iatrogénique des actes médicaux et de l’imapct psychologique qu’ils peuvent avoir sur des personnalités « fragiles ».
J’ai eu personnellement à faire face à une patiente qui sollicitait des soins « à tout prix », dans un contexte émotionnel très instable. L’historique médical révélait de multiples interventions qui avaient toutes aggravé (dixit) les douleurs mais qui la poussait à consulter sans cesse. Comme pour votre patient, la descriptions des symptomes n’en finissait plus : exargérations, hyperboles… J’ai écouté, documenté le cas mais préféré ne pas intervenir en réalisant que mes compétences et mes outils thérapeutiques étaient trop limités face à l’ampleur des symptomes décrit.
Ces cas cliniques de patients – que je qualifie de « très peu adaptatifs » – méritent d’être identifiés avant toute intervention. Pour ces patients, toute modification organique (spontannée ou provoquée) entraine une modification psycho-émotionelle et/ou vice versa. Un cercle vicieux s’installe très vite et il possible d’imaginer qu’un syndrôme psychiatrique/psychanalytique les pousse vers des sopignants en réclamant des interventions médico-chirugicales. Une sorte de rapport sado-masochiste inconscient… Mais je m’égare, car comme vous, je ne suis pas psychiatre. Il n’empèche que je trouve cette discipline fort intéressante et si quelques notions dans ce domaine peuvent m’aider à repèrer ce type de patient, je suis preneur.
Gardons toujours à l’esprit le PRIMUM NON NOCERE auquel j’auterais bien volontiers PAS DE TRAITEMENT SANS DIAGNOSTIC.
Pour votre patient, comme pour la mienne : D’ABORD NE PAS INTERVENIR!!! C’est frustrant lorsque l’on consacre sa vie à soigner les autres mais il ne faut pas le voir comme une défaite, plutot comme un match nul.
P.S : entierement d’accord avec votre phrase de conclusion.